06/2014 - "Le supplice des pales" sur le site "lejeudi.lu" 18/6/2014
Pour voler par-delà les frontières, il faut un peu de ténacité.
Les GR Business Days concentrent à Luxexpo le plus grand rendez-vous d’affaires de la Grande Région.
Schengen, entre Luxembourg, Allemagne et France. Un drone décolle en bourdonnant pour faire un relevé cartographique de la zone, sans prêter attention aux limites territoriales. Si aucune demande n’a été faite, l’infraction sera consommée dans au moins deux des pays concernés.
Pas simple, quand on lance une société innovante, d’être confronté à des réglementations différentes dans les quatre pays de la Grande Région sur lesquels on espère développer son business. C’est le cas de Jean-Marc Simonis et Bernard Yasse, qui tentent de développer Dronelab, société spécialisée dans l’utilisation d’engins volants télécommandés pour la réalisation de photographie et d’inspection aérienne comme la photogrammétrie, la topographie, la thermographie.
Ce qu’on demandait avant aux avions, satellites, ou autres ballons captifs, on peut le réaliser aujourd’hui plus précisément et à moindres frais avec des drones. Mais voilà: les législations nationales doivent s’adapter à la nouvelle technique; sans encore oser penser à une norme européenne commune. «En Belgique, on ne peut pas faire voler un drone, sauf à des fins scientifiques, ou pour l’agriculture. En France, la législation est la plus souple, mais n’autorise pas tout. En Allemagne, c’est aisé, mais il faut des autorisations. Et au Luxembourg, c’est les règles de l’aéromodélisme qui s’appliquent, et il faut plusieurs semaines pour avoir le feu vert. Quand on sait que notre activité est tributaire de la météo, on réalise le casse-tête.»
Tout circule… ou presque
A part ça… tout va très bien. Aujourd’hui, travailler sur une zone qui recouvre plusieurs pays ne génère pas trop de problèmes administratifs. La société est basée au Luxembourg, où les paiements des clients arrivent d’au-delà des frontières. Les taxes ne sont pas un souci, grâce au système de TVA intracommunautaire. Et les opérateurs de drones peuvent eux aussi exercer leur art d’un pays à l’autre. Il n’en reste pas moins que pour faire tourner pales et rotor, il faut montrer patte blanche.
«Pour y voir clair dans tous les règlements, il a fallu nous débrouiller nous-mêmes», expliquent les deux hommes,convaincus que le principe du «Aide-toi toi-même» reste une bonne maxime pour l’entrepreneur qui veut embrasser la Grande Région.
Des start-up comme la leur, il y en a des dizaines rassemblées à Luxexpo jusqu’à ce jeudi soir dans le cadre des Greater Region Business Days. Avec, pour la grande majorité, cette même volonté de dompter les frontières.
«En 2030, il n’y aura plus de disparités fiscales et sociales entre les pays», estime Raymond Schadeck, président de Luxinnovation et Luxexpo, invité avec d’autres à livrer sa vision d’avenir dans le cadre du symposium inaugural. Il ne fait de doute pour personne que la formation est un élément clé de la réussite du projet commun. L’Université de la Grande Région est, selon la Sarroise Helma Kuhn-Theis, un élément fédérateur trop peu connu, qui peut contribuer à faire rester les jeunes dans la région, et à y trouver de l’emploi. «Mais on n’arrivera jamais à développer un grand projet si les mandataires politiques des entités constituant la Grande Région continuent à éviter de se rencontrer», déplore Roger Cayzelle, président du Conseil économique, social et environnemental de Lorraine.
Il y a pourtant du concret, et pas du moindre: Ainsi, le salon accueille cette année 240 exposants, (40 de plus que l’an dernier). Et 4500 rendez-vous d’affaires avaient déjà été programmés avant son ouverture (+ 1000). Salon que l’on visite plus aisément grâce à une application pour smartphone, œuvre de la société luxembourgeoise Jeeni. Originalité du produit: il s’agit d’un modèle standard, qui correspond aux besoins de la plupart des utilisateurs, et ne demande donc pas de frais de développement. Un modèle à suivre.
L'article est disponible via ce lien